Le secteur extractif au sein de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) – Dynamiques régionales et levier de croissance

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    La zone ouest-africaine, comme le reste du continent regorge de richesses avérées en substances minérales, bien que, sur le plan géologique, des terrains demeurent encore sous-explorés. Fort de ce potentiel du sous-sol, les Hautes autorités des Etats de l’Afrique de l’Ouest ont vite pris conscience de la contribution certaine que pourrait apporter l’industrie minière extractive dans le développement socio-économique de leurs Etats et de leurs populations.

    Au sortir des indépendances, dans les années 1960, une politique volontariste et monopoliste avait caractérisée l’orientation donnée à l’exploitation des ressources minérales. Dans cette vision, l’exploitation de ces ressources devait procurer des revenus financiers substantiels pour permettre aux jeunes Etats d’amorcer leur développement économique. Malheureusement comme on a pu le constater, les résultats escomptés sont restés en deçà des attentes.

    Tirant les leçons de cette expérience, et avec l’appui des institutions multilatérales, des réformes politiques et des choix économiques effectués ont permis, à partir des années 1990, d’ouvrir entre autres, le secteur de l’industrie minérale de la plus part des Etats ouest-africains, à l’investissement privé, notamment international. Cette période, a été caractérisée par des approches nationales et individualistes, installant dans des zones géographies communes une compétition entre les Etats et n’a pas favorisé une approche de coopération entre ces Etats. Ce qui n’a pas permis aussi dans ce cas, une contribution optimale du secteur minier à l’amélioration des conditions de vie des populations.

    L’UEMOA : instrument clé de la coopération en matière minérale

    Face à une économie mondiale de plus en plus compétitive, des regroupements géographiques d’Etats, notamment la création de blocs régionaux, ont été faits à travers le continent africain et ailleurs. Ainsi, en janvier 1994, de la volonté de Chefs d’Etat et de Gouvernements est née l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Cette Union regroupe en Afrique de l’Ouest, huit Etats à savoir le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo.

    Le traité de l’Union fixe les objectifs suivants : (i) renforcer la compétitivité des activités économiques et financières, (ii) assurer la convergence des performances et des politiques économiques, (iii) créer entre les Etats membres un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens, des services, des capitaux, etc., (iv) instituer une coordination des politiques sectorielles nationales par la mise en œuvre d’actions communes et éventuellement de politiques communes dans divers domaines dont celui des mines, (v) harmoniser, dans la mesure nécessaire au bon fonctionnement du marché commun, les législations et particulièrement le régime de la fiscalité.

    Dans cette dynamique, et convaincu que le secteur minier extractif peut être un contributeur essentiel au développement socio-économique des Etats membres à l’instar des pays industrialisés comme le Canada, l’Australie, etc., les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont adopté, par l’acte additionnel n°01/2000, la Politique minière commune de l’UEMOA. Cette dernière vise notamment : (i) l’instauration d’un climat propice à l’investissement miniers, (ii) la diversification de la production minière, (iii) la transformation sur place des produits miniers, (iv) la coexistence mines industrielles-artisanat minier, (v) l’amélioration des infrastructures, (vi) l’accroissement de ressources financières aux Etats et la création d’emplois, et (vii) la préservation de l’environnement.

    Pour l’opérationnalisation de cette vision minière commune, le code minier communautaire de l’UEMOA a été adopté par le règlement n°18/2003/CM/UEMOA du 23 décembre 2003. L’adoption de ce code vise notamment à aplanir la disparité et gérer l’inadéquation des cadres réglementaires des Etats membres qui ne permettent pas de créer un environnement favorable pour l’optimisation de l’exploitation des ressources minérales au profit des pays de l’Union et de leurs populations.

    Ainsi, les huit Etats membres de l’UEMOA disposent désormais d’une politique claire et d’un cadre réglementaire pour fédérer les actions en matière de promotion et développement d’une industrie minière compétitive au service de leur développement socio-économique durable.

    Ces dispositions sont mise en œuvre sous l’impulsion de la Commission de L’UEMOA, organe d’exécution des politiques et orientations définies par les Chefs d’Etat et de Gouvernement.

    Quelques résultats concrets ?

    A cet effet, des actions concrètes ont été réalisées au profit des Etats membres. L’on peut citer notamment :

    1. La promotion du développement minier dans les Etats. En effet, la Commission facilite la participation des Etats à diverses manifestions internationales (PDAC) et nationales (Journées de promotion minière du Burkina Faso dénommée ‘’PROMIN BURKINA’’), véritables cadres d’échanges et de promotion des secteurs miniers respectifs. Elle soutient techniquement et financièrement la tenue de journées de promotion minière que certains Etats membres organisent régulièrement (Burkina Faso, Mali et Sénégal).
    2. Le renforcement des capacités, une préoccupation dans l’espace communautaire. Des formations d’experts nationaux en système d’information géographique et des équipements en hard et en soft  des centres de documentations des Etats contribuent à améliorer la gestion des données pour les rendre davantage accessibles aux investisseurs et aux chercheurs. Toujours dans ce registre, l’Ecole des mines et de l’industrie du Niger bénéficie d’un appui financier pour accroitre ses capacités de formation d’ingénieurs dans les métiers des mines.
    3.  La promotion de la bonne gouvernance est une réalité dans nombres d’Etats membres. Depuis sa mise en œuvre, cinq pays de l’Union sont déclarés pays conformes à l’Initiative de transparence des industries xtractives (ITIE). Un appui technique et financier est accordé aux Etats dans le cadre de la mise en œuvre du processus ITIE.
    4. L’instauration de cadres de concertations constitue une politique de coopération. A cet effet, des rencontres organisées annuellement sur divers thématiques constituent des occasions d’échanges et de mutualisation d’expériences. Ces réunions tournantes dans les Etats regroupent à la fois les acteurs clés tels que les administrations publiques en charge des mines, les représentants des Chambres des mines et Groupements professionnels des miniers, des structures en charge de l’ITIE et des femmes du secteur minier.

    En outre, et plus généralement, la Politique minière commune et le Code minier communautaire de l’UEMOA ont largement contribué à l’élaboration de la Vision minière de l’Afrique, stratégie continentale qui vise à faire du secteur minier un levier efficace de développement socio-économique durable et d’industrialisation des Etats africains riches en ressources minérales.

    En perspective, divers chantiers vont voir le jour pour renforcer davantage la mise en œuvre de la Politique minière commune en vue d’optimiser de manière significative, la contribution du secteur minier extractif à l’amélioration des conditions de vie des populations des pays de l’UEMOA. A ce titre on peut souligner la révision en cours du Code minier communautaire, mis à jour pour l’adapter à l’évolution de l’environnement minier international et prendre en compte les intérêts des parties, notamment ceux des communautés riveraines des zones d’activités minières. Le renforcement des capacités des Etats va également s’intensifier à travers : (i) l’amélioration de la gestion des données géo-minières et des cadastres miniers, (ii) la formulation et la gestion de contrats et conventions minières modernes, (iii) une meilleure compréhension de la fiscalité et de l’économie minière, (iv) un encadrement optimal de l’artisanat minier, (v) l’amélioration des infrastructures géologiques et minières de base, (vi) le renforcement du « local content » dans les Etats, etc.

    La mission fondamentale de l’UEMOA dans le secteur est de contribuer à une exploitation équitable et optimale des ressources minières pour une croissance accélérée et un développement socio-économique durable des Etats membres dans l’optique de la Vision minière de l’Afrique.

    Emile Bangraogo Kabore est le Chargé des mines et pétroles de l'UEMOA.

     

     

     

     

     

     

    La version anglaise : The Extractive Sector in the West African Economic and Monetary Union: Regional Dynamics and a Driver of Growth

    Cet article a été publié dans GREAT insights volume 3, numéro 7 (juillet/août 2014) 

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